Une rencontre qui fait «boum»
francomanias … Le
chanteur Stéphane Blok et le légendaire
contrebassiste Léon Francioli font alliance
le temps d'un spectacle et d'un album qui entraînent la chanson française
loin de ses bases. Rencontre.
Jean-Philippe Bernard
Le film de la vie défile à une telle vitesse
qu'on a parfois de la peine à se souvenir de la bobine précédente.
C'est ainsi qu'hier encore, juste avant que Jérémie Kisling ne
prenne la relève, Stéphane Blok envoûtait
Paname avec ses complaintes urbaines made in Lausanne. Déjà,
on prédisait pour ce jeune noctambule racé une place en vue sur
le toit du monde. Moins d'une décennie plus tard, le Romand est revenu
sur les bords du Léman, sans aucun regret puisque ses principes lui ont
toujours interdit de faire n'importe quoi. Ce printemps, après avoir
collaboré à quelques projets théâtraux et cinématographiques,
il revient rôder aux frontières d'un univers familier. A l'instant
où on
le rencontre dans une brasserie lausannoise, il regarde, intrigué, Léon
Francioli, son voisin de table en train de se préparer, selon ses
termes, «une cochonnerie».
Avec application, Francioli verse donc dans
une chope immense remplie de glaçons et d'un zeste de citron quelques
décis d'un vin ordinaire puis l'équivalent d'un bon verre de coca
light. Après avoir mélangé le tout avec son doigt, il précise:
«Je dois faire très attention avec le sucre alors je cherche des
trucs qui me procurent un peu de plaisir tout en ménageant ma santé.
Là,
c'est super car il n'y a pas un gramme de sucre et on a toutefois l'impression
de se bourrer la gueule en buvant une Margarita. En plus, il faut deux
heures pour boire ça tranquillement...»
Blok, perplexe, trempe ses lèvres dans la mixture puis l’che un
énigmatique «ah! oui». Même sans cette moue, on avait
compris que le chanteur n'avait pas abordé le légendaire contrebassiste
pour échanger
les recettes de cocktails improbables. Ou pas seulement: issus de
culture et de générations musicales différentes, les Vaudois
ont fait alliance pour défricher un nouveau territoire. «L'essentiel du
temps que nous passons ensemble est néanmoins consacré à des
discussions sur des thèmes aussi divers que la politique, les femmes et
la musique»,
note Francioli. «On se connaissait depuis un certain temps, plus
humainement qu'artistiquement. On buvait des verres. En décidant de
faire un duo, nous avons accepté d'entamer une sorte d'échange,
comme une partie de ping-pong.»
Le jeune rebelle et son vaillant
aîné
ont travaillé dans l'ombre du studio durant des mois avant que de
laisser jaillir les musiques et les chansons brûlantes comme les nuits
d' été en Alabama qui composent aujourd'hui Boum, disque
ouvert et libertaire nourri aux ondes troublantes du jazz, de l'électronique
et de la fièvre. C'est cette bande-son pour nuits blanches, où
résonnent les rumeurs de ville et le chant troublant d'une jeune femme
(Eleonora de Souza) témoin de toutes sortes de révolutions concernant
les hommes ou les astres, que le public des Francomanias pourra
découvrir.Mais
il ne faut pas attendre un tour de chant traditionnel de la part d'un
chanteur qui refusa le cadre étroit dans lequel l'industrie
discographique voulait l'enfermer, surtout lorsque celui-ci fait
alliance avec un dynamiteros remarqué jadis aux côtés de
Michel Portal ou de Félix Leclerc. Comme tient à le préciser
Block, «le spectacle comprend deux tiers de l'album mai, joué autrement. Sur
scène, un titre comme Les éphémères change
radicalement et passe d'une minute 45 à près de 10 minutes...»I
> Je 22 h 30 Bulle
Ebullition.
> Blok-Francioli, Boum, distr. Disques Office.
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